La commende majeure du Roussillon : Une confrérie historique

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Fondée en 1374, dissoute à la Révolution française et ressuscitée en 1964, la Commende Majeure du Roussillon représente une fascinante fusion du passé et du futur dans le monde viticole du sud de la France. Aujourd’hui, sous la houlette de Jean-Claude Estirach, cette confrérie historique embrasse le changement et s’efforce de connecter son riche héritage à une audience plus jeune et plus diverse.

Un nouveau chapitre
À la Révolution française, toutes les confréries ont été supprimées. La nôtre, avec. Il a fallu
attendre des personnes qui aient l’idée de revenir à ce qui se faisait auparavant”, raconte
Jean-Claude Estirach, actuel Grand Maître de la Commende. Cette renaissance, initiée en
1964 par le syndicat des AOC et les confréries bachiques, était un mouvement de retour aux racines viticoles de la région, historiquement reconnues pour leur qualité.

Un héritage familial
Le renouveau de la Commende ne constitua pas seulement un mouvement communautaire
mais fut aussi une affaire de famille. “Mon oncle était le président du Conseil interprofessionnel des vins doux naturels. Il a été le président fondateur de la deuxième mouture de la Commende majeure”, explique Jean-Claude Estirach, également Doyen de l’académie des confréries du languedoc et du Roussillon, VicePrésident des Fédération des Confréries des Régions de France et Vice-Président du Conseil Européen des Confréries Oenogastronomiques.

Une œuvre qu’il poursuit désormais, non seulement en préservant les traditions mais enles réinventant pour les générations futures. Originaire de Perpignan, il n’a pas entamé sa
carrière dans le vin, mais dans le commerce des fruits et légumes. “J’ai commencé ici, à
Perpignan, à Saint-Charles, comme courtier, et puis je suis parti à Rungis. J’ai été grossiste
en fruits et légumes pendant vingt-cinq ans” raconte Jean-Claude. Pendant quinze ans, il préside les Catalans de Paris, période durant laquelle il cultive sa passion pour les confréries. C’est à la même époque que sa dévotion pour les traditions régionales se solidifie, notamment lors d’un événement clé à Antony en 1999, organisé par Patrick Devedjian. “Il organisait chaque année, le premier week-end de septembre, une Foire aux Fromages et aux Vins. J’ai fait monter la Commende Majeure. Et l’on a fait un chapitre exceptionnel. C’est là que nous avons décidé d’instaurer un jumelage qui consistait à choisir un Catalan de Paris pour représenter une cave ou un producteur d’ici”.

Ce fut un succès retentissant qui renforça son lien avec la Commende Majeure et préfigura
son futur rôle de leader. Il fut intronisé en 1998, et sa transition vers la présidence de
la Commende Majeure n’était pas préméditée. Après avoir refusé une première proposition, il accepta finalement le poste suite au retrait de son prédécesseur. “Je ne voulais pas m’imposer par mon nom” explique-t-il.

Inclusion et innovation
Sous Jean-Claude Estirach, la Commende va radicalement évoluer. “Quand je suis arrivé, il y avait trois femmes. Aujourd’hui, j’organise des chapitres strictement féminins”, précise-t-il. Un changement qui reflète une volonté d’ouverture et de vivre avec son temps. La Commende Majeure ne se contente plus d’introniser des personnalités politiques ou des célébrités ; elle s’est souvenue de ses vignerons indépendants, reconnaissant ainsi ceux qui sont véritablement au cœur de l’industrie viticole. “Je me suis rendu compte, qu’à force d’introniser des personnalités, on avait complètement oublié que l’on avait des vignerons. À part les présidents de syndicats, il n’y avait pas de vigneron indépendant. Depuis, chaque année, nous intronisons tous ceux qui sont médaillés d’or au Concours Général Agricole. C’est ce qui nous a aussi permis de rajeunir la confrérie”.

L’Alliance avec les Toques Blanches
La Commende Majeure ne se limite pas au monde du vin. Sous l’impulsion de Jean-Claude
Estirach, un partenariat innovant a été établi avec les Toques Blanches. “Un jour, avec Jean Plouzennec, on s’est dit qu’il fallait faire un partenariat. J’ai intronisé tous les chefs de
l’association”, partage-t-il. Une collaboration qui souligne l’importance de la gastronomie
dans la culture viticole et enrichit l’expérience de tous les membres, créant un pont entre les arts culinaires et la viticulture.

Pérenniser et innover
Avec un mélange de respect pour le passé et d’innovation pour l’avenir, la Commende Majeure du Roussillon montre que la tradition viticole peut évoluer et rester pertinente. Elle illustre parfaitement la manière dont l’union des traditions viticoles et des innovations contemporaines peut revitaliser et perpétuer un héritage culturel riche. En ouvrant la confrérie à une diversité plus grande, notamment avec l’introduction des chapitres féminins, et en établissant des partenariats stratégiques comme celui avec les Toques Blanches, Jean-Claude Estirach a su redéfinir l’impact et l’attrait de la Commende. Ces efforts ont enrichi l’expérience culturelle de ses membres. Reste désormais à renforcer l’intérêt des jeunes générations pour le vin et la gastronomie. En tissant des liens indissolubles entre le passé et l’avenir, les confréries comme la Commende Majeure du Roussillon ne se contentent pas de préserver un héritage ; elles tissent la trame d’un futur riche et vivant, prouvant que la tradition n’est pas seulement un souvenir à honorer, mais un socle sur lequel bâtir demain.