André TRIVES, le symbole d’une agriculture vivante et consciente

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À la barre de sa microferme, André Trives sème les graines d’un futur plus vert et enraciné dans les valeurs d’une agriculture qui respecte autant l’humain que son environnement. Ce maraîcher pas comme les autres, ancien grossiste en poissons, a troqué ses filets pour s’ancrer dans les terres fertiles de la permaculture.

“Mon grand-père avait un chalutier à Port-Vendres et mon père était devenu commercial dans le poisson. J’ai passé un BAC Agricole et je suis allé en école de commerce. Et puis on a monté un atelier de mareyeur. En parallèle j’avais un petit jardin où j’ai commencé à cultiver. J’ai eu ma première fille, j’ai pris conscience de l’importance de l’alimentation. C’est devenu compliqué à un moment donné, plus de sardines, plus d’anchois… je commençais à péter un peu un plomb, une sorte de burn out… Le bio, la biodynamie, ça me branchait pas mal, et un jour au cours d’une conversation, un collègue m’a parlé de permaculture”.

En 2017, il plonge la tête la première dans le sol vivant, cette science qui allie écologie et traditions ancestrales pour un mariage fertile entre l’homme et la terre. “On ne voulait pas travailler en bio ou en conventionnelle, cela ne nous intéressait pas. On voulait avoir une empreinte positive au niveau environnemental. On ne voulait pas une agriculture qui pollue, on a vite compris que pour travailler sans intrant extérieur, il fallait offrir le gîte et le couvert à tous les êtres vivants qu’il y avait dans le sol”

Sa première mission ? Redonner vie au sol. Cela a commencé par l’aérer et introduire de l’oxygène vital. “Si tu veux de beaux légumes, tu as besoin d’eau, d’air et de chaleur”, explique André. Armé de patience, il a intégré une cinquantaine de tonnes de matières organiques et de fumier, invitant ainsi toute une armée de micro-organismes à s’installer.

“Nous avons dressé un banquet pour les vers de terre”, plaisante-t-il. En réalité, André a méticuleusement structuré le sol avec un couvert végétal, utilisant des légumineuses pour fixer l’azote. “L’azote est crucial pour la croissance des plantes. On a donc passé six mois à enrichir le sol avant d’entamer la structuration du jardin avec des techniques d’agroforesterie, en particulier en plantant des arbres de la famille des rosacées. Ces arbres jouent un rôle clé, car selon les recherches, ils aident à communiquer des informations essentielles aux autres plantes, grâce à un réseau de champignons souterrains appelés mycorhizes”. Des efforts qui permettent aujourd’hui à sa centaine de variétés de légumes, de fleurs et de fruits non seulement de pousser, mais de prospérer, de développer une saveur intense et de nourrir les corps mais aussi les âmes des chanceux qui les consomment. C’est une AMAP, lancée par ses soins, qui diffuse ses produits locaux. “On a commencé avec des paniers pour les familles”, explique-t-il. “Maintenant, on en est à une centaine par semaine, sans oublier la dizaine de restaurants avec lesquels on travaille à Perpignan, à Narbonne et un peu à Paris”. Une expansion crescendo, fidèle à la philosophie de la permaculture : croître naturellement. Sa méthode ? Une agroécologie qui rejette les intrants chimiques et qui favorise un écosystème autonome et résilient. Il parle de son sol avec tendresse, expliquant comment il a dû le décompacter pour y intégrer de l’oxygène. “La présence de vers de terre, c’est le signe que l’on a réussi”, s’exclame-t-il, fier de ses quatre tonnes de lombrics à l’hectare.

Ses expériences, il les partage en tant que président du réseau Maraîchage Sol Vivant, et sur YouTube, où des centaines d’heures de visites de fermes inspirent une nouvelle génération d’agriculteurs. Mais André n’est pas que maraîcher ; il est aussi un acteur associatif fervent, impliqué dans la création d’une Maison de la semence catalane et d’un label environnemental, Arbres et Civilisation. “Ce label, c’est l’avenir, dit-il, il mesure l’impact réel de nos pratiques sur l’environnement”. André Trives cultive bien plus que des légumes. Il cultive un avenir où nourriture, environnement et société se nourrissent mutuellement, dans une danse harmonieuse orchestrée par la nature elle-même. “On n’est
qu’à 5 % de l’aventure”, conclut-il, les yeux brillants d’une vision qui dépasse les rangs de son champ fertile. Et nous, nous sommes prêts à le suivre dans les 95 % restants.